André Stempfel, qu'on ne présente plus au Salon des Réalités Nouvelles expose : « Je dérange » du 16 mai au 22 juin 2013 à la galerie Lahumière à Paris.
"Les facéties d’un monochrome :
Les
mouvements modernistes du début du XX° siècle nous ont enseigné que le tableau
n’était plus une fenêtre d’illusion mimétique ouverte sur le monde, mais une
construction mentale qui se matérialise en un objet bien concret, de forme et
d’épaisseur variables, sur lequel on pose des pigments.
Et dès les
années 20, Van Doesburg nous a démontré que l’espace du mur participait de la
composition picturale. (Composition en trois parties 1920). Dans la
logique de cette voie, André Stempfel s’adonne d’abord à une abstraction
géométrique rigoureusement construite, mais dont les éléments rapidement
attirés par l’espace, se dissocient pour gagner les trois dimensions. Ainsi sont
subverties les disciplines canoniques de la peinture, de la sculpture et de
l’architecture.
Son œuvre
se développe simultanément dans tous ces domaines. Depuis les années soixante,
parallèlement au travail sur châssis et au travail du châssis, ses
interventions dans l’espace public ont été nombreuses. Cependant,
malgré une formation qui passe aussi par le volume, il semble bien que la
peinture reste la matrice de tout ce déploiement. Qu’elle s’accroche au mur,
qu’elle s’expanse dans un espace architectural ou qu’elle se divertisse avec le
socle de la sculpture classique.
Du
séquentiel, de la série, qui sont les outils traditionnels de l’Art concret historique, André Stempfel a gardé
le principe, mais c’est pour en faire un usage gauchi. Parce qu’au lieu de
décliner des permutations rigoureuses, ses séries s’apparentent plutôt à des
séquences ludiques et narratives, à des enchaînements de postures au cours
desquels ses formes prennent la tangente.
Elles se
désolidarisent de la toile qui ne parvient pas à les retenir, se répandent
simultanément sur plusieurs supports, s’émancipent. La
structure du tableau elle-même n’est pas épargnée. Les tribulations qu’on lui
fait subir vont bien au delà du shaped canevas. Son intégrité est mise à mal. La
toile se fend, des éléments s’en échappent, elle se recroqueville, s’enroule,
se contorsionne, rebique...
Si la
peinture d’André Stempfel semble à première vue sacrifier au jeu du
trompe-l’œil, c’est pour en pousser la logique jusqu’à l’absurde, l’excéder en
allant jusqu’à la transformation réelle de la toile, jusqu’à la concrétisation
matérielle d’une illusion d’optique. Quant à la prouesse du sculpteur, elle
consiste à nous faire croire à la souplesse d’une pièce de bois. Et puisque
la composition se fait directement en travaillant l’objet-tableau, le peintre
peut se contenter du monochrome et s’en tenir une bonne fois pour toutes à sa
couleur de prédilection.
Ce sera le
jaune.
Pas n’importe quel jaune, mais un jaune tonique, léger et dense comme le
condensé d’un faisceau de lumière. "
Hubert Besacier 2013
(Extrait de la Préface à l'exposition)