mardi 26 mars 2024

Hélion étonnant Malevitch

Quand Jean Hélion participe à la fondation de Réalités Nouvelles en 1939, il a déjà abandonné l'abstraction comme on peut le voir dans la rétrospective qui lui est consacré au Musée d'Art Moderne de la ville de Paris jusqu'au 18 août 2024.

Plus jeune membre d'Abstraction-Création, c'est sur la recommandation de Doesburg que Hélion lors de son voyage en Russie en 1931 part a la recherche de Lissitzky et de Malevitch  ! Il erre en Ukraine, (Malevitch est alors toujours vivant mais assigné à résidence), et arrivé à Kharkiv on lui dit face à son insistance que Malevitch est en vacances ! Finalement il retrouve Tatline ouvrier dans une usine d'aviation, un peu hébété qu'un jeune artiste français le connaisse. Dans la rue une vieille femme alors interpelle Hélion en français : " Vous croyez tout voir, vous ne voyez rien". Et elle disparaît. 

La parenté entre les œuvres figuratives de Malevitch et de Hélion est étonnante : moujiks contre cadres  à chapeau mou... Eglise contre boutique... Couleur en aplat, traits noirs...

 
 
Helion  Tête versus  Malevitch Tête

Hélion versus
Malevitch


Comme si l'abandon obligatoire du carré noir pour l'un sur ordre de Joseph Staline avait trouvé sa correspondance et son prolongement chez l'autre, en réponse, en écho, par un abandon du futurisme, du suprématisme, de l'abstraction... Abandon comme une fidélité au cubo-futurisme russe ! Alors même que Hélion revient horrifié de son voyage en Russie ! Holodomor et la famine débutait en 1932. Il croyait voir il se sait aveugle !

Dans une vidéo, des années 1960 on voit Zao Wu Ki, écouter Hélion lui expliquer comment les toits de zinc de Paris lui semble aussi abstrait que ses propres premières toiles géométriques aux plans colorés dégradées influencées par De Stijl. Dans une autre il se souvient de l'humour espiègle de Mondrian et de sa manière de faire ses courses rue Daguerre, remerciant les marchands de quatre saisons avec un salut de son chapeau mou... Et de ses chaussettes à fleurs ! Comme les personnages dans ses tableaux !

N'est ce pas là, le sujet même de ses peintures ! Peindre la vie des peintres... Comme une légende dorée !  Hélion semble avoir rendu hommage aux peintres qu'il a aimé et qui l'ont aimé...

On souviendra aussi que c'est dans son atelier parisien que Merce Cunningham a dansé son premier solo, que Rauschenberg a présenté pour la première fois ses Combines...

Passeur... Il perd la vue... Aveuglé de Poussin, de lumière et d'hélium.

Malevitch - Autoportrait

Hélion -Autoportrait

Je ne copierai donc pas le dossier de presse de l'exposition pour en faire ma critique - comme un journaliste d'un quotidien de référence du soir, que je ne suis pas. Il est donc ici !

Bonne visite !

E.L.