L'abstraction
L'abstraction est un processus inhérent à la
compréhension du monde, par lequel nous tentons d’appréhender les événements.
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Ce processus révèle les lois et constantes cachées
derrière les événements, pouvant répondre aux questions fondamentales de notre
existence : origine, finalité, devenir. « Ce n’est pas un processus
primaire au sens propre du terme, puisque nous recréons ce que nous avons déjà
expérimenté, simplement nous comprenons les choses sur un mode différentiel.
L'abstraction dérive de cette expérience perceptive qui fait naître une réalité
secondaire, autrement plus intense. Il s’agit d’un processus de réécriture du
monde appréhendé par les sens, qui établit un lien avec ce qui, dans l’opinion
générale, n’est autre que le monde perçu »[1]
L’abstraction résulte d'une capacité à visualiser des
notions en faisant appel à des symboles. Elle rend possible la représentation
de celles-ci par une mise en corrélation avec nos croyances. Elle présuppose
que les réponses à nos questions sont impossibles à définir par la seule
représentation mimétique de la vision que nous avons de notre environnement.
« Elle ne coïncide pas avec ce qui est visible, elle crée plutôt sa propre
visibilité. Par conséquent, selon Klee, c’est par l’art que nous apprenons à
voir ». [2]
Lorsque la figuration diffère de la représentation exacte de la réalité
sensorielle, et que sont modifiés ou abandonnés certains éléments de celle-ci,
le processus d'abstraction devient palpable. Selon les lois naturelles de proportion
du monde visible, l'abstraction constituerait une perte. A la place de la
représentation mimétique, de la perspective basée sur la symétrie établie à la
Renaissance, l'abstraction reflète, par le biais de ce manque, les
correspondances cachées de la représentation du réel. L’abandon partiel des
lois naturelles de proportion de la réalité palpable est généralement ressenti
par le spectateur comme un manque, une imperfection. Cette forme d’absence est
le champ qui sépare la représentation de la perception du réel. N'étant pas
nécessairement semblable à la réalité, l’œuvre fait son premier pas vers
l’abstraction. « Cette tendance à l'abstraction soustrait en quelque sorte
l’œuvre au flux des événements, elle l'élève, la libère de toute incidence, ce
qui la rend autonome », comme l’indique Worringer dans son livre.[3]
L'œuvre d'art, par le processus d'abstraction,
participe de la sacralité du monde alors même que, de nos jours, cette dernière
est reléguée au second plan. La question est de savoir si aujourd'hui
« nos sociétés post-traditionnelles fondées sur le discours, peuvent
vraiment passer outre la logique du marché. Le fait que les personnes (avant
tout échange ou rapport de forces) soient responsables les unes des autres
a-t-il encore un sens à nos yeux, dans une société où « le concept de
sécularisation... dénote un processus de décalage/d’écartement, qui éloigne la
culture laïque de ses origines sacrées ?[4]
L'art est lié au créateur et au spectateur, sur lequel
il a un impact. Ainsi que Belting le souligne : « il (l’art)
fonctionne de par l’usage qui en est fait. Contrairement à l'art, la technique
ne nous donne pas la possibilité d'interpréter. Les médias créent un monde
d'apparences, dépourvu de réalité physique et spatiale. Il s’agit d’un
phénomène global qui ne nécessite aucune expérience culturelle personnelle.
A partir du moment où, dans cette course à l'innovation, les artistes veulent créer avec les outils que leur offrent ces différents médias et techniques, le rôle du sacré nous apparaît des plus essentiels.
A partir du moment où, dans cette course à l'innovation, les artistes veulent créer avec les outils que leur offrent ces différents médias et techniques, le rôle du sacré nous apparaît des plus essentiels.
Janos Kalmar